Au clair de la lune
The voice of Scott de Martinville
in the first sound recording of history
Édouard-Léon Scott de Martinville est un typographe et correcteur d’épreuves scientifiques Français, il développe à partir de 1850 le Phonautographe.
Guidé par le développement de la photographie dont le dispositif de captation reproduit l’œil, il imite l’anatomie de l'oreille humaine : un conduit, un tympan et des osselets pour concevoir une machine capable de photographier le son. L’appareil est constitué d’un cylindre à manivelle enduit de noir de fumée, d’un pavillon, d’une membrane et d’un stylet.
Ce stylet, un brin de soie de porc, connecté à la membrane trace une ligne à travers le noir de fumée, un fin résidu de carbone déposé par la flamme d'une lampe à pétrole sur une surface mobile de papier ou de verre. Le son capté par l'oreille artificielle et transmis au brin de soie provoque la modulation de la ligne en fonction des variations passagères de la pression acoustique, créant un enregistrement graphique des ondes sonores.
L’étymologie du nom choisi par l’inventeur phon (le son) et autographe (qui s’écrit de lui-même) en dit long sur les ambitions de Scott de Martinville. Interpellé par la question de l’antériorité de la langue parlée sur la langue écrite, il rêve d’un dispositif qui permettrait une écriture “automatique” du son et dont les graphies ainsi produites pourraient être lues, visuellement et directement, tel un ancêtre du logiciel de dictée vocale.
Le phonautographe bien que soutenu par le Société d’Encouragement Scientifique pour l’Industrie Nationale Française et breveté en 1857 restera cantonné à une utilisation scientifique dans les laboratoires où il fait office d’ancêtre de l’ oscilloscope.
L’histoire aurait pu s’arrêter là car 20 ans plus tard, Edison rencontre un triomphe avec son Phonographe, un dispositif extrêmement proche du Phonautographe. L’invention d’Edison n’est pas seulement capable d’enregistrer le son, mais réalise surtout une prouesse hallucinante pour l’époque: reproduire l’enregistrement. L’avènement des machines parlantes est en marche. Le son détaché de sa source devient une chose en soi. L’inventeur français lui s'efface.
C’est en 2008 qu’une équipe de chercheurs américains, en quête des plus vieux enregistrements sonores humains se sont lancés dans l’analyse graphique des lignes tracées sur les Phonautogrammes. C’est ainsi que 140 plus tard, la voix d’Edouard Léon Scott de Martinville retentit à nouveau de l’autre côté de l’atlantique. Comme extirpée du fond des âges par la technologie informatique, une voix fantomatique chantant la comptine Au claire de la Lune est audible. Enregistrée le 09 avril 1860, la voix de l’inventeur resta silencieusement immobile, figée à la surface d’une feuille de papier durant plus d’un siècle. Cet enregistrement est aujourd’hui considéré comme le premier enregistrement sonore connu.